Construction d’un mur en pierres et mortier de chaux

Montage d’un mur à la chaux en opus incertum

Dans les années 70, notre cloture a été frappée d’alignement (et le four à pain a été détruit, c’est navrant). Ne subsiste qu’une semelle en attente, support idéla pour remonter un mur. Voici ma technique de montage du mur à la chaux hydraulique (NHL) en opus incertum (les pierres sont enchevêtrées aléatoirement).

A l’issue un enduit à la chaux aérienne (CAEB) sera pratiqué dessus, les pierres ne resteront que légèrement apparentes.

Les matériaux

Il faut utiliser les matériaux disponibles sur place (meilleur rendement écologique), dans le perche thymerais, la pierre dominante est le silex, c’est celle que l’on va utiliser.

Autour de chez nous, on trouve aussi du grison (pierre de couleur noire et rouille, très ferrugineuse) mais elle est à réserver aux éléments de décoration (piliers et entourages).
Le sable également aura également son importance pour l’enduit, ce sera du sable fin lavé (à 90%), donc encore chargé de quelques particules d’argile pour teinter légèrement.

Avec, de la chaux hydraulique NHL et aérienne CAEB (dans tous les bons magasins de matériaux), quelques outils de maçon (brouette, pelle, truelle, planches à coffrage), du temps et de la passion, il sera facile de bien faire. Astuce indispensable, il faut protèger ses mains, j’utilise de vulgaires gants de ménage, une paire l’une sur l’autre (sinon une seule paire se perce trop vite).

Choisir un modèle de mur

Avant de commencer, il est surtout primordial de faire quelques recherches historiques, munis de son appareil photo, il suffit d’arpenter la campagne environnante (maxi une dizaine de kilomètre autour de chez soit), et d’observer les murs, et trouver le modèle le plus typique et le plus ancien pour s’en inspirer.

Le modele le plus ancien de mur se reconnait à la forme de son nez (où se forme la goutte d’eau), ici avec un débordement de pierres (et un enduit très moche).

Celui ci a un nez en tomettes carrées.

Autre nez en pierres, ce mur est plus haut, environ 2m30.

Plus ancien et très localisé autour de chez nous, ce mur de rempart avec débordement de grison (les grosses pierres marron), qui date du Moyen-age.

Voici des pilliers en brique typique du 19ème, et de notre commmune, notre longère étant du 19ème on va s’en inspirer.

Enduit à la chaux aérienne pour ce mur de propriété, les pierres sont légèrement apparentes, avec nez en briques.

Le Mortier

Le mortier a son importance car il permet de maintenir les pierres l’une contre l’autre, on ne veut pas faire un mur trop rigide (les parpaings s’est pas par ici), on veut le décoffrer rapidement (parfois 2 heures après), et solide. La chaux permet de solidifer le mortier ; les murs de chateaux sont fait en chaux aérienne pour résister aux énormes
pressions lié aux poids des pierres. J’utilise un mortier batard (mélange de chaux hydraulique et aérienne). Certains murs étaient même montés à l’argile (sans chaux), mais cela nécessite aucune infiltration d’eau par la suite au risque de voir le mur s’effondrer.

- 1 volume de terre : c’est l’astuce, en effet la terre (plutot argileuse) permet de rendre le mortier collant, executant un effet ventouse sur les pierres, ce qui permet un décoffrage rapide.

- 1 volume de chaux (mélange de chaux aérienne et chaux hydraulique)

- 3 volumes de sable et gravier : le gravier n’est pas indispensable, celui ci n’est pas trop gros et ne sera pas genant.

On remue le mortier à sec, à même la brouette (la betonnière est inutile car le montage se fait lentement)

Ajout de l’eau dans le mortier.

Après avoir remué, le mortier ne doit pas être trop liquide, on doit pouvoir prendre l’équivalent de 2 poignées dans une main.

Coffrage

Ici la semelle du mur est déja prête, donc le montage du mur en est grandement facilité.

En guise de coffrage, une porte de récupération est idéale en taille, la voici montée le long du pillier en briques.

Sur l’arrière je met des planches à coffrage (cf photo), avec serre joints et chevilles pour maintenir tout cela.

et je maintiens l’écart supérieur avec des lattes en bois vissées sur les planches, la largeur fait 22cm. Après il « suffit » de remplir le coffrage, je met du mortier et je viens appliquer les pierres les unes contre les autres, l’idée étant d’avoir le maximum de surface de la pierre qui touche le coffrage.

En retirant le coffrage, du mortier est parvenu à se glisser entre les pierres, il faut le retirer et le récupérer pour le rajouter dans le prochain mortier.

Montage d'un mur à la chaux avec coffrage et pierre vue

Le mortier retiré les interstices entre les pierres sont mieux visibles, et on déplace notre coffrage un peu plus loin.

on arrive au bout du mur, on s’apprête pour le deuxième niveau (mon mur fera 1m40 fini).

Et on recommence au début à un niveau supérieur, une paire de palette pour être à la bonne hauteur

la casquette est réalisée avec les pierres en débordement (des pierres relativement plates), le dessus est nivelé mais le lendemain un coup de brosse mettalique permetrra de faire apparaitre les pierres du dessus.

le mortier en surplus entre les pierres, est à retirer.

une fois arrivé au bout, l’opus incertum fait son effet.

Enduit à la chaux aérienne

L’enduit ne sera pas fait tout de suite, le principe étant de poser trois couches à densité de chaux différente,
avec une semaine d’intervalle entre chaque couche, et en mouillant le support la veille :
- gobetis : 1 volume de chaux pour 3 de sable
- dégrossis : 1 volume de chaux pour 4 de sable
- finition : 1 volume de chaux pour 5 à 7 de sable, il faut talocher ou lisser (aplatir avec la truelle du Haut vers le Bas) mais surtout ne pas gratter au risque d’enlever la fine pellicule alcaline en surface

Pour conclure

Une bonne restauration est avant tout une restauration qui ne se voit pas ; pour que ce mur se confonde avec les anciens murs, il sera recouvert d’un enduit à la chaux aérienne (mais je n’en ai pas encore trouvé le temps pour le faire), seulement quelques pierres seront apparantes (c’est un enduit grossier à pierre vue).

S’agissant du mur de clôture, bien des personnes passant par là se sont arrêtés pour admirer ; ce fut un moment pour partager cette méthode de construction.

Il faut bien du temps, mais c’est relatif (si on devait créer ses parpaings pour monter son mur…), et avec un coût relativement faible les pierres étant récupérées auprès des agriculteurs, reste à acheter quelques sacs de chaux et du sable.

 
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